biographie en français

Livio dans son atelier

Livio dans son atelier

Livio est né en Italie, à Vérone en 1946. Même s'il ne passa que quelques années dans sa Vénétie natale, sa terre d’origine a toujours beaucoup compté pour lui. Une grande fierté et admiration pour son premier pays, des grands maîtres de la Renaissances à la belle simplicité de ce qu'il considérait comme la meilleure cuisine du monde. De la beauté des paysages de sa région aux inégalables exploits de Valentino Rossi sur ses deux roues.

En 1949, la famille Benedetti, Gino et Maria, qui reposent non loin au cimetière de Myans, Marie la grande soeur, Robert le petit-frère et Livio mirent le cap sur la France et la Savoie. Livio n'avait que 3 ans et Robert était tout bébé. L'anecdote veut que la destination initiale voulue fut plutôt de l'autre coté de l'Atlantique – Les Etats Unis d'Amérique.

Après quelques années la famille s'installera à Myans, où Gino, le père, aidé de Livio et Robert, bâtiront la maison familiale située à quelques pas de cette église. Gino était maçon et ceci aura été un élément si important pour Livio. Livio se définissait toujours comme maçon, avant même de se définir comme sculpteur. Il se revendiquait de cette famille des bâtisseurs. A Myans, la famille Benedetti s’agrandira avec l’arrivée de Raphaelle, la petite sœur adorée qui eut sur les murs de sa chambre une des premières œuvres de Livio.

Travaillant à l'une de ses dernières oeuvres

Travaillant à l'une de ses dernières oeuvres

Livio suivit des études de "technicien supérieur " en bâtiment, continuité de ce métier de maçon, pour s'inscrire dans la suite de son père. Il était un élève modèle. Peu d'entre nous étions là pour vérifier… et pour preuve il suffit de se rappeler son tour de France réservé aux meilleurs élèves de chaque département, qui se terminera à l’hôtel Matignon. Ce sera la première rencontre de Mr Pierre Dumas, alors secrétaire d’état. Une rencontre dont il était si fier.

Livio s'éloigna un peu de Myans, dans un premier temps à Annecy, où il y rencontra de grands amis qui seront là pour toujours… Puis bien plus loin, dans les forêts des Ardennes, à Charleville Mézieres où il effectua son service militaire. C'est alors que Livio s'aventura sérieusement en dehors des sentiers battus pour façonner ses premières sculptures. Une série de têtes en bois que l'on pouvait voir encore récemment à la rétrospective qui eut lieu à Chambéry ce printemps, et qui n'ont rien perdu de leur force.

En montagne, les frangins Robert et Livio

En montagne, les frangins Robert et Livio

Lors de ce service militaire, Livio rencontra Florence qui deviendra sa femme et la mère de ses enfants. Il prit là bas, la résolution de faire de la sculpture sa vie, mais aussi celle de se rapprocher aussi vite que possible de ses Alpes adoptives qu’il adorait tant. Pour Livio, il n'y avait pas de région plus belle que celle dans laquelle nous sommes aujourd'hui, il n'y avait pas de formes plus majestueuses que celles des montagnes. Se rapprocher d'elles pour mieux les gravir était vital. Il y construira de grandes et solides amitiés. Il y trouvera une source d’inspiration inaltérable. Livio et Florence rejoindront la Savoie en 1973, en passant par la Bourgogne accueillante où leurs fils Luc et Roland verront le jour.

A partir de 1975, Livio installera son Atelier à Chambery, où il passera le plus clair de son temps. Il avait decidé que la Sculpture serait sa vie, il y travailla comme un acharné, alors dans des conditions incroyables, avec les moyens qui étaient les siens, la rue Basse du Château comme théâtre, au pied du Château des Ducs où son oeuvre vient d’être célébrée, comme un clin d’oeil aux origines. Il y bâtit aussi de nombreuses amitiés, comme partout où il passait.

Ce n’est que bien plus tard, en 1989 que Livio s’installera sur les pentes du mont Granier à Apremont, dans cette ferme achetée à l’état de ruine avec la complicité de Robert et Florence, et reconstruite pierre par pierre pour devenir le merveilleux atelier que beaucoup d’entre vous connaissent.

Livio, Jonas et Hugo Pratt

Livio, Jonas et Hugo Pratt

La vie de Livio fut bien trop riche et trop généreuse pour la retracer en quelques lignes. Il est néanmoins des pans qu’on ne peut oublier. En 1982, Livio rencontre Hugo, le créateur de bandes dessinées, le papa de Corto Maltese. Hugo Pratt fut pour Livio l’ami, mais aussi un second père, une inspiration permanente, une exigence à la hauteur de la sienne, une poésie des plus belles, une précision dans le trait égal à celle de  Livio dans les formes, un dégout pour la médiocrité, une discrétion absolue aussi.

Sa vie d’artiste fut petit à petit reconnue, à partir du milieu des années quatre vingt dix et lui permit de finalement commencer à vivre de son métier. Avec l’aide de quelques amis qui se reconnaitront, il parvint à développer son travail au delà du petit cercle des initiés, pour le faire découvrir par delà les frontières. Son œuvre s’imposa, à force d’évidence, comme une oeuvre majeure, d’une grande diversité, moderne et classique à la fois, intemporelle, libre et habitée, qui touche tous les publics. De nombreuses sculptures en témoignent et en témoigneront encore de longues années,  de la Sarrazine que l’on peut admirer sur les rives du lac de Tigne, au Dernier des Justes à Aix les Bains. De la Dame du Vent placé à Savoie Technolac, au buste de Monsieur Pierre Dumas visible à l’entrée du tunnel de Fréjus.

Sa vie d’homme fut tout aussi riche. Elle s’inscrivit dans la constance. La constance de l’exigence, mais aussi la constance de la générosité, tant avec sa famille que ses amis. Une générosité infinie, une chaleur sans égale, une convivialité permanente, allié à une réelle curiosité de l’autre. Elle s’inscrivit dans la liberté aussi; la liberté de penser et la liberté d’exister, par delà les idées reçues, par delà les courants, par delà les schémas.  Et personne n’oublie son caractère bien trempé.  Ce tronchu qu’il était en aura fait baver plus d’un.

En 2010,  Livio fut attaqué par la maladie. Il ne lui laissa aucun répit jusqu’à il y a moins d’une semaine. Il combattit l’ennemi comme un lion, avec la force qui l’a toujours caractérisé, et ce sans jamais se soustraire à ce qu’il était, sans jamais s’arrêter d’exister. Ses tout proches, qui l’accompagnaient au quotidien ces dernier mois et dont l’amour et l’aide furent inestimables peuvent en témoigner : jamais ils ne l’auront entendu se plaindre, jamais ils ne l’auront entendu abdiquer. Toujours il garda sa ligne généreuse, qui nous a portés, nous porte et nous portera par la mémoire et par ses oeuvres.

Livio, croqué par Hugo Pratt

Livio, croqué par Hugo Pratt